Le Pacte Finance-Climat a été rendu public mardi 19 février à Paris. Ce projet de traité européen, censé mettre la finance au service de la Terre, prévoit la création d’une banque européenne du climat et de la biodiversité, et la constitution d’un fonds spécifique.
Fixer un cap ambitieux. Le faire en quelques mots, aussi compréhensibles par tous les citoyens que les sept mots par lesquels John Fitzgerald Kennedy annonça aux Américains qu’ils iraient sur la Lune. C’est le défi lancé par les défenseurs du projet de traité européen pour un Pacte Finance-Climat, rendu public mardi 19 février à Paris.
Il y a vingt ans, un virage historique en matière de protection de l’environnement aurait pu être pris par les États-Unis eux-mêmes. Lors de l’élection présidentielle de 2000, l’enjeu était déjà là, dans toute sa gravité. On ne peut pas refaire l’histoire ni prêter à Al Gore, le battu de cette étrange élection décidée dans les tribunaux de Floride, des vertus magiques. Mais il avait une vision et il ne fait aucun doute que la spirale sécuritaire et pétrolière de l’administration Bush, légitimée ensuite par le choc du 11-Septembre, a fait perdre à l’Occident un temps précieux.
Vingt ans plus tard, l’urgence climatique est plus évidente encore. Ses coûts humains et économiques sous les yeux de tous. Un sursaut est donc nécessaire. Et cette fois, avec Donald Trump à la Maison-Blanche, la balle est dans le camp des Européens. Voulons-nous assister passivement à la stagnation de l’économie du vieux continent et compter les points du match USA-Chine ? Ou entendons-nous relever le défi environnemental en ouvrant ainsi une perspective de développement et d’innovation, dans le respect de normes que le monde entier nous envie ?
Le Pacte Finance-Climat est ambitieux. Il prévoit la création d’une banque européenne du climat et de la biodiversité, et la constitution d’un fonds spécifique. Ses concepteurs ont déjà tracé le chemin juridique à suivre, sans besoin de la règle de l’unanimité qui paralyse trop souvent les débats européens. Il revient donc aux dirigeants européens, lors du prochain sommet du 21 mars, d’en faire ou non un axe prioritaire.
Un formidable antidépresseur
Un sondage publié cette semaine indique que près de trois Français sur quatre sont favorables à ce projet d’envergure. Son impact potentiel sur l’approvisionnement énergétique, le logement, le transport, l’industrie, les modes de consommation en fait un projet structurant en tant que tel. Et c’est précisément ce qui fait défaut à notre débat politique actuel. En mal de projets fédérateurs, en mal d’horizon.
Car entre la menace de la fonte des glaces et le risque de régression démocratique, la tentation peut être grande aujourd’hui de se replier, de se mettre aux abris, de baisser le regard. De cultiver son jardin, en attendant que la tempête passe. Mais dans quel jardin, puisque, cette fois, c’est l’environnement lui-même qui est le sujet ? Nous sommes cernés, autant agir !
Derrière l’ambition du projet, ce Pacte censé mettre la finance au service de la Terre dispose-t-il du poids politique suffisant ? C’est toute la question. Paris et Berlin peuvent avoir un rôle majeur pour lancer le projet, s’ils parviennent à fédérer ne serait-ce que la moitié des pays membres de l’Union européenne. L’annonce du lancement d’une plateforme industrielle censée créer des champions européens va dans ce sens.
Emmanuel Macron entend-il en faire une priorité dans le discours attendu qu’il doit prononcer dans les prochaines semaines, en perspective des élections européennes ? Il faut l’espérer. Car un grand projet audacieux porte plus qu’un discours alarmiste. L’opinion publique est sans doute plus lasse qu’on ne veut bien le dire du nihilisme des populistes. Traiter l’environnementpeut être un formidable antidépresseur.