Entouré de nombreuses personnalités, l’économiste Pierre Larrouturou a rappelé le but de son projet de pacte Finance Climat: forger un nouveau rêve européen.

 

Voilà plus d’un an qu’ils battent la campagne. A coup de livres-manifestes et de réunions publiques, l’économiste Pierre Larrouturou et le climatologue Jean Jouzel martèlent que la crise climatique n’est pas une fatalité.

Mieux: que des solutions «simples» existent. C’est à Paris que les deux compères avaient prévu, mardi 19 février, de mettre un terme à leur marathon.

Clin d’œil, c’est dans le grand amphithéâtre de l’université de Jussieu (siège de l’institut Pierre-Simon Laplace de recherche sur l’environnement et le climat) que les promoteurs du pacte Finance Climat avaient prévu de se compter. Ils étaient nombreux.

Dès 18 heures, l’amphi était plein à craquer. Encadrés par l’ancien président de l’Ademe[1] Bruno Lechevin, les bénévoles ont dû faire asseoir une quarantaine d’étudiants directement sur la scène

Que proposent les deux duettistes du climat? D’abord, que les (bientôt) 27 Etats membres de l’Union européenne concluent un traité intergouvernemental instaurant l’Union pour le climat et la biodiversité. Rédigé par une équipe de juristes coordonnée par Olivier de Schutter (université catholique de Louvain), le texte prévoit surtout la création d’une filiale de la Banque européenne d’investissement.

1.000 MILLIARDS

Cette banque européenne du climat et de la biodiversité devrait gérer un fonds européen de 1.000 milliards d’euros, abondé par une taxe carbone sur le chiffre d’affaires des entreprises. 1.000 milliards? C’est, à peu de chose près, le montant que l’Europe doit investir dans sa décarbonation entre 2021 et 2030 si elle veut atteindre ses propres objectifs, rappelait la Cour des comptes européenne, en septembre 2017. De quoi dynamiser l’investissement en faveur de la transition écologique. Ce ne serait pas du luxe d’ailleurs. La France, a calculé l’Institut pour l’économie du carbone (I4Ce), lui consacre 40 Md€/an, presque la moitié du montant nécessaire à l’atteinte des objectifs énergie-climat.

EST-CE UNE BONNE IDÉE?

Pour le futur ex-maire de Bordeaux Alain Juppé, «c’est une idée intéressante qui mérite d’être creusée». La députée (LREM) de la Haute-Marne, Bérangère Abba, adhère aux principes. Avec son badge Exit the Brexit, l’ancien ministre britannique des affaires étrangères, Denis McShane, estime que la création d’une banque du climat et de la biodiversité est «une idée géniale». Autre ancien patron d’une chancellerie, l’Italien Sandro Rozi voit le projet de pacte Finance Climat comme une formidable occasion de réconcilier les citoyens avec un projet européen enthousiasmant.

LE DURABLE CONTRE L’INSOUTENABLE

Karl Kalkenberg craint toutefois que ce ne soit pas suffisant: «La quasi-totalité des politiques européennes ne sont pas durables. Il faut aussi une solide volonté politique», souligne l’ancien numéro 2 de la direction générale de l’environnement à la Commission. Pascal Lamy souscrit à l’idée, tout en s’interrogeant sur la nécessité de conclure un nouveau traité.

Pierre jetée dans le débat des élections européennes, le pacte Finance Climat a-t-il un avenir? Tant que les questions fiscales seront tranchées à l’unanimité des pays membres de l’UE, c’est peu probable. Mais l’ambition de Pierre Larrouturou est ailleurs, semble-t-il. L’économiste, qui ne se présentera pas, espère que le projet concocté avec Jean Jouzel sera porté par un grand nombre d’eurodéputés écologistes qui pourraient se retrouver en position charnière après les élections du 26 mai.

CONSIGNE DE VOTE

Un gros groupe écolo pourrait faire pencher, dans bien des cas, les arbitrages en trilogue en faveur du climat et de ses instruments financiers. Une façon comme une autre de donner une consigne de vote. Reste à savoir combien de listes présenteront les écologistes français. Une question ouvertement posée par l’assemblée de Jussieu à Delphine Batho, Yannick Jadot et aux représentants de Place publique.

Ademe: Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie