Anne Hessel membre fondatrice de l’association et Édouard Bouin Administrateur général d’Agir pour le Climat ont publié une tribune dans plusieurs quotidiens régionaux qui résonne aujourd’hui avec l’action de Pierre Larrouturou au parlement européen.

Alors qu’une grande partie de la France vit une sécheresse dramatique, dans le Sud, des départements ont subi une fois encore un épisode cévenol, plus violent que les précédents. Les spécialistes du climat disent depuis bientôt 30 ans que ces évènements météorologiques seront plus fréquents et plus intenses chaque année. Des travaux de l’Institut Pierre Simon Laplace pour la Fédération Française de l’Assurance décrivent les coûts provoqués par les aléas climatiques : sécheresse, incendie, tempête, inondation, submersion marine. Pour la période 1985-2014, les assurances ont déboursé 42 milliards pour couvrir de tels évènements. Au regard de l’évolution des émissions de gaz à effet de serre de la fin du siècle écoulé et de la première décennie de celui qui débute, les remboursements pour la période 2015-2040 pourraient être de 92 milliards dont 4 pour les submersions marines ! Quel sera le coût pour la seconde partie de ce siècle si nous ne changeons pas de trajectoire radicalement ?

La présidente de la Commission européenne, Madame Ursula von der Leyen semble bien l’avoir compris. Récemment, dans son discours sur l’état de l’Union, elle proposait de porter de 40 à 55 % la réduction de nos émissions de gaz à effet de serre (en 2030 par rapport à 1990). Ces annonces sont importantes pour la COP26 à venir. L’Europe doit être « la première de cordée » afin d’éviter la catastrophe. Mais comment atteindre ces objectifs et celui de la neutralité carbone en 2050 ?
Le Green Deal ou Pacte vert européen doit être doté de 1 000 milliards pour la période 2021-2030, mais les mécanismes de financement demeurent flous. En tout état de cause, la trajectoire de réduction des émissions gaz à effet de serre de 55 % d’ici à 2030 nécessite des montants bien supérieurs. La Cour des comptes européenne estime l’ensemble des besoins de financement chaque année (privés et publics nationaux et européens) à 1 115 milliards. À l’échelle de la France, les montants nécessaires sont estimés entre 55 et 85 milliards d’euros par an, soit 2,5 à 4 %1 du PIB.

Notre association défend l’idée d’un Pacte Finance-Climat européen2 et est heureuse que sa proposition de banque du climat ait été reprise. Mais il y a loin avant que la Banque européenne d’investissement puisse se revendiquer comme telle. D’autre part, le chantier budgétaire, celui qui dotera l’Europe de ressources propres, reste ouvert. L’Europe va devoir rembourser les 390 milliards des subventions accordées aux État pour le plan de relance. Une taxe de 0,1 % sur les transactions financières est soutenue par tous les groupes à l’exception de l’extrême droite : elle rapporterait 50 milliards d’euros chaque année. Elle est techniquement et juridiquement prête depuis 2011 ! 15 milliards pourraient être dévolus au remboursement de la dette et 35 milliards au Green Deal. D’autres pistes sont explorées par la Commission européenne pour doter l’Union de ressources propres : taxe sur les déchets plastiques, sur les géants du numérique, sur le kérosène, sur les bénéfices des grandes entreprises, ajustement carbone aux frontières de l’Europe. À terme, cela pourrait représenter 100 milliards de budget propre pour l’Europe.

Une partie de ce budget pourrait servir, comme nous le préconisions dans le Pacte Finance-Climat européen, à doter de plusieurs milliards un plan massif d’aide au pays africains et du pourtour méditerranéen. Les pays du sud sont et seront gravement impactés par le changement climatique alors qu’ils ne sont que marginalement responsables du problème. La crise actuelle des migrants, avec son cortège de drames humains, s’accentuera et la Méditerranée deviendra le plus grand cimetière marin de la terre si l’Europe – Nous – n’intervient pas. Comme le dit le climatologue Jean Jouzel dans un échange avec le journaliste Baptiste Denis : « Deux mots-clés à retenir sont solidarité et investissement ».