“Une réalité en deçà des chiffres publiés”, c’est ainsi que la Cour des comptes européenne, dans un rapport spécial, qualifie son expertise des dépenses climatiques du budget de l’Union Européenne de 2014 à 2020.
Ses auditeurs avaient retenu les objectifs suivants :
- Vérifier la fiabilité et la pertinence des dépenses climatiques pour la période 2014 -2020.
- Analyser la réalité de la réalisation de l’objectif d’utilisation d’au moins 20 % du budget de l’Union européenne pour les actions en faveur de la lutte contre le changement climatique.
- Examiner la justesse de comptabilisation des dépenses climatiques de l’UE.
- Explorer le cadre de suivi des dépenses pour l’après 2020.
Green Deal, Fit for 55, tous les investissements supposés “verts” ont été analysés et décortiqués. La première observation portée dans le rapport dit clairement que “les dépenses déclarées ne sont pas toujours liées à l’action pour le climat”. La moitié d’entre elles concernent le secteur de l’agriculture via le Fonds européen agricole de garantie (FEAGA, qui intègre la PAC) et le Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER). Or, les émissions d’origine agricole ne diminuent que très faiblement. Pour la période considérée, la baisse se situerait entre 2,5 et 4,2 %, baisse qui serait d’ailleurs due à une réduction de l’activité dans le secteur de l’élevage. En ce qui concerne le soutien au développement rural, il n’apporte “globalement aucune contribution majeure aux objectifs climatiques”.
La Cour des comptes estime que 59,1 milliards d’€ imputés comme contributeurs à l’action climatique ne le sont pas.
Le rapport aborde ensuite les dépenses en matière d’infrastructures et de cohésion, réalisées au titre du Mécanisme pour l’interconnexion en Europe (MIE), du Fonds européen de développement régional (FEDER) et du Fonds de cohésion (FC). Le MIE est un pilier de la politique climatique et énergétique de l’UE. Toutefois, la Commission avoue que la majorité des projets retenus ne présentent pas d’objectifs climatiques. La Cour qualifie de “généreux et incohérents” les coefficients utilisés par la Commission pour verser ses aides en faveur de l’action climatique. La surestimation pour ces fonds serait de 12,9 milliards !
Les membres de l’Union européenne signifiaient leur satisfaction d’avoir atteint l’objectif fixé de 20 % des dépenses (soit 216 milliards d’euros) en faveur de l’action climatique pour la période 2014-2020. La cour des comptes corrige à la baisse de 72 milliards la déclaration de l’UE. Nous pouvons nous inquiéter de la réussite du Fit For 55 et du Green Deal. Certes, il y a une volonté nouvelle, mais les financements ne sont pas à la hauteur des objectifs à atteindre.
Rappelons-nous que, lors de leur audition par la Cour des comptes européenne, Jean Jouzel et Pierre Larrouturou, co-fondateurs de notre association, avaient entendu les sages de l’institution européenne dire qu’il nous fallait investir 1 115 milliards par an entre 2021 et 2030 (dont 1/3 provenant de finances publiques) pour tenir les objectifs de l’accord de Paris. Nous en sommes très loin. Et malheureusement, une partie des financements ne contribue pas à cette action, pire joue contre !